Hommage
La dernière fois que nous avons vu Renée, ma fille et moi étions pleinement conscientes que nous ne la reverrions peut-être jamais. Et cela s'est avéré vrai. Ce jour-là, j'ai donc voulu graver dans ma mémoire les impressions qu'elle m'avait laissées et qui resteraient à jamais dans ma mémoire. Le plus mémorable était son sourire. C'était le même sourire qu'elle avait lorsqu'elle m'avait rencontré pour la première fois. C'était près de vingt ans auparavant, lorsque ma compagne, Fabienne, était encore en vie et que notre fille, Camille, n'était pas encore née. Ce sourire était une fenêtre sur son âme. C'est à ce moment-là qu'elle m'a raconté qu'elle avait été messagère pour la résistance belge pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle transportait des messages dans ses sous-vêtements d'une ville à l'autre en train. Elle avait à peine 15 ans et risquait déjà sa vie. Cela m'a particulièrement touché, car trois des frères de ma mère, à peine plus âgés que Renée, risquaient également leur vie en tant que soldats dans l'armée américaine. Ils faisaient partie des soldats encerclés à Bastogne qui ont refusé de se rendre aux Allemands. Tous trois ont miraculeusement survécu, tout comme Renée. Elle n'a jamais été capturée. Je me suis souvent demandé si ses parents savaient qu'elle prenait ces risques, ou à quel point ils étaient grands. Si elle avait été capturée, elle aurait presque certainement été torturée pour révéler qui lui avait donné le message et à qui il était destiné. Peut-être qu'elle ne savait pas tout ça, mais elle allait quand même être torturée. Peut-être qu'elle n'y avait jamais pensé. Peut-être que ses parents ne savaient pas, auquel cas elle était super courageuse et sûre d'elle. S'ils le savaient, ça montre bien leur amour pour leur pays et la liberté, vu qu'ils laissaient leur fille faire une tache aussi dangereuse. Renée aimait Fabienne, la meilleure amie de Martine, et surtout notre fille. Elle gardait des photos des deux sur son étagère devant son lit. Elle les montrait toujours lorsque nous lui rendions visite, avec ce sourire ouvert et affectueux. Ce sourire espiègle et enfantin qui cachait toujours un secret, quelque chose d'amusant qui venait du fond de son cœur. Et ce cœur était bon. Elle a passé ses dernières années à tricoter pour les autres. Elle tricotait de petits carrés colorés qui seraient assemblés pour former une couverture afin de réchauffer une autre personne. Elle parlait toujours de ces personnes comme de celles qui étaient dans le besoin. Elle continuait à travailler pour ceux qui étaient dans la nécessité, qui avaient besoin de chaleur et de réconfort. Elle a passé ses dernières années à faire quelque chose de constructif pour ceux qui étaient dans le besoin et qu'elle ne rencontrerait jamais. Rien ne reflète de forme si poignante la personne qu'elle était que cela. Au revoir, chère et adorable Renée, et merci.
Kenneth Strauss- 01-08-25